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Jeudi 13 novembre, jeudi 13 novembre, ça va faire une semaine que je m'interdis d'oublier que la marque "Comme des Garçons" investit le grand magasin H&M et, comme dirait l'autre, : "y en aura pas pour tout le monde !"

J'ai raté Karl Lagerfeld (Allegra avait 40 de température, je ne pouvais pas lui imposer ma fièvre acheteuse), j'ai oublié la journée Stella McCartney, je ne passerai pas à côté de “Comme des Garçons”.

J'y vais seule, personne dans mon entourage ne souhaite s'imposer un tel truc de fou. Hermine est à New York et m'a dit "bon courage, ma pauvre pomme", Victoire est trop riche pour se prendre la tête chez H&M et Sandrine n'a pas les nerfs assez solides pour affronter ce type de situation. C'est qu'il va falloir une bonne dose d'endurance et de pugnacité pour se taper l'attente et la cohue que ce genre d'événement engendre.

Les enfants sont à l'école sans se douter le moins du monde que leur mère va affronter un univers parallèle et probablement devoir se battre pour une pièce de créateur.

 

8h50: Le magasin ouvre ses portes à dix heures tapantes, je décide néanmoins d'aller faire un tour, histoire de voir si les vitrines portent déjà les couleurs "Comme des Garçons".

Santa Madonna, il y a déjà la queue devant la porte, je crois rêver. Je ne suis pas une looseuse, je suis une battante, je vais m'accrocher. C'est décidé: je reste.

 

9h15: J'ai froid, j'ai le bout des pieds tout recroquevillé et je respire dans mon écharpe, pour grappiller un semblant d'air chaud. Je fais la queue derrière un transsexuel qui vient d'incruster deux de ses "copains, copines" au nez et à la barbe de tout le monde.

Comme je n'ai pas bronché, j'ai eu droit à un "elle est trop chou" qui m'a fait avaler la pilule.

Ces "dames" discutent fashion, elles m'apprennent qu'il faut impérativement se procurer les écharpes à pois, apparemment the pièce incontournable of the collection. Le problème est que l'on ne sait pas à l'avance où cet article sera placé dans le magasin; il va falloir être rapide et aller à l'essentiel. J'ai compté dix-neuf personnes avant moi, dont au moins huit homos qui ne devraient pas représenter de concurrence sérieuse, à moins d être intéressés par les petits cardigans à pois.

Il faut que je me concentre sur ma cible, je ne laisserai quiquonque se mettre en travers de mon chemin.

 

9h40: Je compte les minutes, je suis gelée et je commence à me dire que ce n'est plus de mon âge, ce genre de plans. Je suis limite à abandonner et à aller me goinfrer dans la première pâtisserie que je trouverai sur ma route. Mais les Dieux de la fashion sont de mon côté car le rideau métallique s'entrouvre et une hôtesse passe avec un plateau de gobelets de cafés fumants. Rien qu'à l'odeur, je peux déjà affirmer que ce n'est pas du nespresso, mais ça fera bien l'affaire, au point où j'en suis.

Je tends la main pour attraper le divin nectar quand mon voisin-voisine me tape sur l'épaule et me donne ce judicieux conseil :

"- Non mais ça va pas la tête ou quoi, tu vas pas t'handicaper avec un café bouillant quand le magasin va ouvrir dans cinq minutes. Elles n’ont pas de cerveau, ces bourgeoises !".

 

9H55: Le rideau métallique est monté d'un cran et cela a provoqué un tel mouvement de foule que les malheureux du premier rang sont littéralement écrasés devant la façade. Ils vont se faire piétiner.

Mes nouvelles copines SOS débrouille m'ont donné pleins de tuyaux.

1 ton sac en bandoulière tu dois porter.

2 ne jamais s'attarder sur les tailles, prendre un lot en vrac et faire son choix plus tard.

3 accumuler le plus d'articles possibles et faire le tri dans un rayon plus tranquille.

On se souhaite bonne chance, comme si on allait sortir des tranchées, je suis excitée comme une malade, c'est trop drôle.

 

9h59: Je suis sur les starting block, à moi la mode pour trois fois rien.

 

10h02: Merde alors, ils vont ouvrir en retard ou quoi? Le rideau métallique est enfin intégralement remonté, mais les portes restent closes. C’est alors que de nulle part surgit un photographe qui se met à mitrailler la foule.

Quelle horreur, la honte, pourvu que personne ne tombe sur ma bobine en train de faire la queue devant H&M, j'ai un standing à maintenir, qu'est ce que vous croyez?

 

10h06: la foule est hystérique, je n'ose même pas me retourner pour regarder cette marée humaine. Ça hurle dans tous les sens quand soudain le moment tant attendu arrive enfin.

C'est la ruée, la foire d'empoigne. Méchant, très méchant coup de chance, mon sac tombe, je me cogne contre un portant et en me relevant j'aperçois l'étagère sur laquelle se trouvent les fameuses écharpes à pois tant convoitées.

Je prends tout le stock disponible et c'est les bras chargés de cette précieuse marchandise que j'arpente le magasin à la recherche d'autres merveilles.

Je sais que vous n'allez pas me croire, je sais que vous allez penser que j'exagère la réalité, mais en moins de dix minutes, il n'y a littéralement plus rien. Les cardigans, les manteaux, les sacs, les robes, tout a disparu et une foule se presse devant les cabines d'essayage. Je suis là comme une pauvre imbécile avec mes écharpes en me maudissant avoir pu même m'imaginer que j'allais faire de bonnes affaires.

Quand je pense qu'on nous rebat les oreilles avec la crise et le pouvoir d'achat qui baisse.

 

10h15: j'ai onze écharpes et des tas de copines qui seraient plus que contentes d'en avoir une. A 50 euros la pièce, je ne vais tout de même pas m'en coller pour 550 euros juste pour faire plaisir.

Une petite blonde me suit depuis quelques minutes. Elle est chargée comme une mule. C'est alors qu'elle m'interpelle.

"- Tu m'échangerais une de tes écharpes contre un cardigan?" Non, je n'hallucine pas, elle me propose de faire un troc en bonne et due forme en plein milieu du magasin. Et la voilà qui farfouille au milieu de son stock pour me chercher la bonne taille.

Notre manège a attiré des curieux qui viennent eux aussi me proposer d'échanger leurs trouvailles contre mes précieuses écharpes.

Les vendeurs restent de marbre. Ils doivent être rodés à de telles pratiques.

 

10h50: Voici la liste de mes possessions "Comme des garçons" :

- une jupe noire, le fameux cardigan à pois en marine, noir et bordeaux, une robe de soirée à faire pâlir Kate Moss et ses pseudo délires chez Topshop, un sac en vinyle parfait pour la plage cet été et les baskets qui vont avec.

Il ne me reste qu'une écharpe, la robe m'en a coûté quatre. Mes envies de (faire plaisir aux autres) rangées au placard, c'est d'un air triomphant que je me dirige vers la caisse.

390 euros tout de même, c'est bien la première fois que je lâche une somme pareille chez H&M mais ça en vaut la peine.

 

11h30: Armée d'une paire de ciseaux, je m'attaque aux étiquettes H&M, tout doit disparaitre. Allez j'avoue, je n'assume pas mais pas du tout ma petite virée au temple du cheap et voici comment j'expliquerai la provenance des articles.

" -Je les ai eus en exclu, l'attachée de presse de “Comme des Garçons” est une bonne copine".

Au royaume du paraître, on est sans foi ni loi.

 

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