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Aujourd'hui rien ne va, je viens de jeter ma troisième plaques de macarons d'affilée. Ces soit disant petites merveilles rondes, bombées et succulentes n'ont même pas des tronches de cake. La meringue s'est affaissée, tout a coulé lamentablement sur la plaque, c'est juste bon à aller directement à la poubelle.
Hier soir nous avons dîné chez les Lambron et la maîtresse de maison avait réalisé de ses blanches mimines une pyramide de macarons absolument démente.
Je vous dois une précision sur la maîtresse de maison: vingt deux ans, taille 36 pour 1m72 au moins et le QI d'une mouche morte. Comment elle qui ne fait pas la différence entre un concombre et une courgette arrive à réaliser un travail aussi élaboré. Il y a forcément anguille sous roche. Le plus horrible est d'avoir mis un chantier pas possible dans ma cuisine et rien à se mettre sous la dent, j'ai comme le désagréable feeling d'être bonne à rien.
Je vais lui téléphoner moi à cette Esméralda et elle va me l'avouer sa supercherie. C'est facile d’aller chez Ladurée et me la jouer "c'est moi qui l'ai fait"
Mais j'ai de l'amour propre et une haute estime de mes talents culinaires depuis que j'ai brillamment réussi le poulet fourré au petit suisse, un must selon mes enfants.
C'est forcement une histoire de proportions, il n'y a pas d'ingrédient miracle dans un macaron que je sache.
"Esméralda ma chérie, ton dîner une vraie réussite et ta pyramide une pure merveille. J'ai très envie de faire quelques macarons mais je n'ai pas de recette, je me disais que tu pourrais me donner la tienne"
"- Ce sera avec plaisir mais ma chérie je ne savais pas que tu voulais te lancer dans la haute pâtisserie."
Non mais pour qui elle se prend, aurait elle oublié que la dernière fois que je l'ai croisé au marché, elle demandait au primeur si il avait du" persil ciselé", comme si c'était une variété qui poussait directement en l'état.
Je vais la jouer profil bas et ne pas lui balancer que si elle y arrive, cela doit être à la portée du plus commun des mortels.
Elle finit par me donner sa recette qui est en tout point identique à la mienne à l'exception de petits détails que j'ai vite fait de juger peu importants. Elle termine par un magistral "Ma chérie ce qui est important c'est le tour de main".
Je t'en foutrai moi du tour de main, je l'imagine bien s'entraîner sur ses mules en satin et son déshabillé qui doit coller à la meringue.
Vu que ma recette et la sienne sont pareilles, je ne vais pas me lancer pour la deuxième fois dans une mission perdue d'avance, il me faut investiguer sur le sujet.
Le résultat ne tarde pas à arriver. En deux coups de fil j'ai appris que notre apprentie cordon bleu s'est fait offrir un stage de cuisine chez the maître of the macaron, le génialissime Pierre Hermé.
Qu'à cela ne tienne, je vais faire de même. Un petit détour par internet me permet de trouver la formation hype du moment et dispensée à la vénérable école Ferrandi.
Pleine de conviction, me voilà appelant le secrétariat de l'école pour réserver ma place. C'est avec stupeur que j'apprends que ces cours sont réservés aux pâtissiers professionnels et que Monsieur Hermé ne dispense pas son précieux savoir à de vulgaires ménagères. Après tout, elles n'ont qu'à passer à la boutique.
Me voilà piquée au vif, cette formation je la veux même si je dois m'incruster et, pour l'occasion en pâtissière pro me transformer.
Quelques petits mensonges et tour de passe passe administratifs plus tard, me voici dans la place. Le stage doit commencer dans deux jours et c'est en relisant le formulaire que je m'aperçois qu'ils nous ont demandé de "venir en tenue et de surtout pas oublier nos chaussures de travail". Ces macarons vont nous coûter un œil, 600 euro pour les deux jours d'apprentissage plus la tenue, mon mari commence à douter du bien fondé de cette entreprise.
Sonia Rykiel a dit "Avoir du style, c'est adapter ses vêtements à ce qu'on est et pas le contraire". Je me suis donc constituée une panoplie en accord avec mes principes: chic et ................chic, ce n’est pas parce que je vais bosser dans une cuisine que je dois me transformer en souillon. Pantalon blanc, veste de chef cintrée et colorée, il n'y a pas à dire, j'ai du panache. Les chaussures ont été difficiles à trouver, elles sont fonctionnelles, des espèces de savates blanches. Je me suis occupée de les customiser avec des stickers hello kitty du meilleur effet. J'en jette grave, accroche toi Pierre Hermé, la relève est sur le chemin.
Pour la galerie, je suis tout de même supposée être en poste dans une chiquissime pâtisserie à Lyon qui m'envoie parfaire mon savoir en matière de macarons.
En entrant dans la grande cuisine, il ne me faut pas plus de deux minutes pour réaliser que je suis totalement ridicule avec mon accoutrement flambant neuf. Pire que tout, mes chaussures blanches rutilantes m'assurent à elles seules un zéro pointé question crédibilité. Discrètement j'entreprends le décollement des stickers, je n'en mène pas large.
Bon c'est un fait, je ne suis pas à la hauteur et j'en suis encore à peser mes ingrédients quand l'ensemble des stagiaires en est lui à dresser ses macarons.
Le formateur s'est rapidement désintéressé de mon cas quand je lui ai assuré que j'apprenais plus à regarder les autres qu'à malaxer la poudre d'amande.
Je vous ferai grâce de la recette, c'est en effet le tour de main qui importe et je le comprendrai un peu tard; lui ne s'improvise pas. Je ne me moquerai plus jamais d'Esméralda, cette fille est un génie.
Je rentre à la maison le moral dans les chaussettes, je n'ai même pas eu le cœur de faire un tour au "Bon Marché" pourtant à cent mètres. J'ai peur d'y retourner le lendemain mais la perspective de la dégustation suffit à me redonner des forces.
J'ai finalement mis la main à la pâte et c'est bien agréable de travailler en équipe même si force et de constater que je suis plus dans un rôle de mirliton qu'autre chose. Nous dressons des plaques de macarons à la poche à douille, c'est plus compliqué qu'il n'y parait et je pousse des cris de joie quand j'en réalise un parfaitement. J'ai avoué à mes compagnons de galère que je ne suis qu'un misérable imposteur et c'est à celui qui m'apprendra le plus en un minimum de temps. Finalement je resterai bien trois jours de plus tant je commence à y prendre goût. Nous sommes à quelques minutes de la dégustation quand le maestro, Pierre Hermé en personne s'approche de nous, histoire de vérifier le travail et d'entretenir le mythe.
Notre petit groupe est en ébullition, c'est à celui qui se fera photographier à côté de son idole. Contre toute attente c'est vers moi que le grand homme se dirige et le voilà qui me complimente sur ces macarons dignes d'être vendus en boutique.
Il me propose de signer mon book de recettes, je ne vais pas lui dire non tout de même mais je serai contente qu'il passe un peu de temps avec les autres, ils l'ont tellement attendu. J'ai à peine le temps de lui passer le cahier de mon collègue le plus sympa qu'il a déjà tourné les talons. Le formateur me glisse que je lui ai tapé dans l'œil, j'en suis malade pour les autres. Nous passons les dernières minutes à empiler le plus de macarons possibles dans des petites boites afin de les rapporter à la maison, j'en connais qui vont se régaler ce soir.
Quatre mois ont passé depuis le fameux stage, je n'ai jamais confectionné un seul macaron et je ne peste plus contre leur prix en boutique. J'ai croisé Pierre Hermé dans son antre de la rue Bonaparte et je l'ai salué comme un collègue, il ne s'en est pas remis.

 

Commentaires

avatar Babeth
0
 
 
les macarons c'est trop bon et c'est pas les plus beaux, les meilleurs.
avatar argone
+1
 
 
tu m'as bien fait rire avec ton post, j'aime ton style ! ne désespère pas et lance toi, c'est en faisant des erreurs qu'on apprend, c'est normal !
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